Description

Pourquoi la pensée politique grecque a-t-elle occulté la question de l’esclavage, pourtant si massive et contemporaine de la naissance de la démocratie ? Qui sait, par exemple, que le jardin de l’Académie a été acquis par Platon avec l’argent de son affranchissement ? Qui parle de l’esclave d’OEdipe qui détient le secret de sa naissance ?
Des liens étroits associent le développement de la société esclavagiste athénienne et l’avènement de la démocratie. L’esclavage y était un « fait social total », imprégnant le fonctionnement de l’ensemble de la société, déterminant les manières d’être des individus, libres ou esclaves. On chercherait pourtant en vain un corps de doctrine ou un grand récit par lequel les penseurs athéniens ont entrepris de légitimer l’esclavage. L’esclavage relevait d’une catégorie déconcertante à nos yeux : celle des institutions qui ne prêtaient pas au débat. Ce livre fait le pari suivant : la relative absence de discours sur l’esclavage chez les auteurs anciens n’est pas l’indice d’un manque pour l’historien qu’il lui reviendrait de combler. Elle est plutôt un symptôme, qui l’invite à observer les formes par lesquelles une société aménage une place à ceux dont elle organise consciemment la non-existence.
Insu, impensé, déni : Paulin Ismard conduit une enquête fascinante à travers les rares discours grecs sur l’esclavage, qui nous éclaire lumineusement sur sa nature à l’époque antique mais aussi moderne. Empruntant à l’histoire comparée et à la littérature, l’auteur s’accorde une rare liberté pour révéler des réalités anthropologiques qui n’ont pas cessé de produire des effets.